Oh la la, que je suis en retard. Enfin, mieux vaut tard que jamais, zeu CR :
http://ufo.ufoot.org/ufoot/2011/crpbp?lang=fr
21 - 24 août 2011
PBP, la légende
L'air de rien, je pourrais presque passer pour un blasé, je commence à
avoir pas mal de courses longue distance au compteur, mais PBP
reste, comment dire, mythique. J'aime les mouvements de foule, et 5000
personnes à vélo pour s'attaquer à 1200 bornes de bitume, ça me parle.
Et puis l'histoire de PBP, cette vieille épreuve, vestige d'une époque
où le cyclisme c'était du vélo et pas du show-biz. Tout ça fait que bon,
tiens, je vous le dis tout de suite, j'aimerais bien en faire 10. 10
PBP. Il faut que je tienne jusqu'à 72 ans. C'est jouable. Difficile,
mais ça se tente. Et si on donnait à chaque édition une lettre de
l'alphabet, celle-ci était la 17ème, c'est donc la lettre Q. En 2015, ce
sera l'édition R. Et donc en 2047 la Z. J'aimerais bien y être. Mais
bon assez rêvé, sans plus attendre, compte-rendu 2011, allez hop!
Mode panique
Le départ fût, et surtout la veille du départ, fût, comment dire,
tendue. Valérie est à la mer avec les enfants. Nous sommes en plein
travaux. J'ai abattu un mur dans mon pavillon de banlieue et après moult
mésaventures nous en sommes à l'électricité. Je me bats avec des
p*tains de baguettes en plastique et des satanés fils électrique rigides
qui ne veulent pas rentrer dedans. Le samedi je vais en moto récupérer
mon dossard à Montigny. En moto. Gros boulet. Il fallait amener son vélo
pour le contrôle du matériel. Ha ha ha. Bonne blague. Mais j'ai tout
fait à l'arrache, en dernière minute. Alors je rentre chez moi, et comme
je n'ai pas, ou plus, de voiture (elle est à Noirmoutiers avec Valérie)
je retourne sur le lieu de départ en vélo depuis Argenteuil. Je connais
bien le trajet je bosse juste à côté. Compter 30km aller. Et 30km
retour. Mais bon, en ce moment, j'ai la forme, c'est pas grave. Je fais
tout mon possible pour rester calme, je suis en train de pourrir ma
journée, j'étais censé me reposer cet après-midi, au lieu de ça je vais
me retrouver à finir les travaux et puis pourquoi je vous parle de ça,
normalement je devrais causer vélo non? En réalité, avant PBP, je ne
pensais pas beaucoup à PBP, j'y ai beaucoup pensé de janvier à juillet,
mais en août, j'étais dans mes travaux. Bah.
Prépa béton
Je vais tout de même tempérer cette note négative, OK j'étais stressé
samedi, OK le mois d'août m'a servi à tout sauf à faire du vélo, mais
globalement, sur l'année en cours, j'ai eu une très bonne préparation,
je trouve. J'ai réussi à faire un 200
, un 300
, un 400
, deux 600 (Noisiel
et Montigny
, un 1000
, sans compter la course à pied.
Surtout, j'ai réussi à me (re)trouver bien sur le vélo, parfois j'en
suis venu à me sentir presque "naturel" sur la selle, après tout en
revenant suffisamment loin en arrière je devais bien avoir des ancêtre
quadrupèdes qui se promenaient naturellement, en position de confort,
avec le dos à l'horizontal. Il y a quelque chose d'animal à se trouver
ainsi presque à 4 pattes, mais pas tout à fait, le pédalier étant plus
bas que le guidon, tout s'ajuste parfaitement pour que le haut du corps
soit pile-poil comme il faut pour fendre l'air le plus vite possible. Je
n'ai jamais fait d'étude posturale pour savoir si ma selle est bien
positionnée ou pas, mais ce que je sais, c'est qu'au départ de ce PBP
2011, moi et mon vélo, on forme une bonne équipe.
Les suspects habituels
Dimanche, départ prévu 16h00. Je pars en début d'après-midi de chez moi,
en vélo (toujours les 30km). Pas très loin du gymnase, dans St Cyr, un
cyclo me demande "vous allez loin comme ça?". Je pense qu'il sait qu'on
fait PBP, alors sur un air de rigolade je réponds "non, non, on va à
Montigny". Mais en y réfléchissant, non, il n'avait pas de sacoche,
rien, donc c'était juste un cycliste, comme ça, qui passait, un beau
dimanche d'août. En l'occurrence, on allait à Brest. Et c'est
fichtrement loin. Et qui d'autre va à Brest? Des copains de l'UVA
mais ils ont choisi les départs suivants. Mais il y a aussi Manu
(Emmanuel Conraux, un ami triathlète), avec qui on se propose de partir
ensemble. Après avoir bien cuit de 14h00 à 16h45 (temps chaud et
orageux, plein soleil, pas d'ombre), enfin, c'est parti.
Le vélo, c'est dangereux.
Et, évidemment, ça serre de partout, ça frotte, on est tous excités
comme des puces. Je reste prudent et je sais que c'est débile de faire
le fou maintenant alors qu'on a plusieurs dizaines d'heures à tirer mais
c'est plus fort que moi, j'ai l'impression que si je lâche ce peloton,
c'est certain, je ne serai pas dans le bon paquet. Alors je remonte
doucement sur les côtés, évite d'être à la traîne, et ne tente pas
d'aller devant, de toutes façons une voiture nous retient et de toutes
façons plus on va devant plus ça grince de partout et je ne veux pas
finir par terre tout de suite.
En parlant de finir par terre, ça ne loupe pas. Je vois avec tristesse
un cyclo qui est tombé quelques minutes avant que je passe, et plus tard
j'en verrai même un tomber sous mes yeux, juste devant moi. Le moment
où l'on espère que les freins sont bons et que les freins du type
derrière, dans le peloton, sont bons aussi. Je m'arrête pour demander au
cyclo tombé s'il va bien. Apparemment, ça va. J'attends qu'il reparte,
il me remercie de l'avoir attendu, et ensuite je fais l'effort pour
rentrer dans le paquet. Bah, je pouvais bien l'attendre deux minutes, on
n'est pas des sauvages.
Oasis
Le premier point de ravitaillement est assez loin. Mortagne c'est pas la
porte à côté. 140 bornes. Je connais un peu le coin j'ai fait le 600 Montigny
. Assez vite je sais que par cette chaleur mes 2 litres de boisson ne
suffiront pas. Fort heureusement, des spectateurs sympathiques et
dévoués nous offrent régulièrement des bassines d'eau, ils ont sorti
leurs tuyaux d'arrosage, font la chaîne pour remplir des bouteilles
d'eau, bref, le long de la route s'improvisent des ravitaillements
sauvages où l'on se procure cette denrée très simple mais totalement
indispensable : l'eau. Comme beaucoup, j'en profite, et je bois
goulument cette bonne eau bien fraîche et quasi tombée du ciel. Sans
cela, bah, j'aurais certainement rejoint Mortagne, mais j'y serai arrivé
dans un sale état. Là, j'arrive, heu, "normal".
On a fait l'élastique avec Manu, mais globalement on s'est suivis. Nous
ne nous séparerons plus, ou que rarement. Manu a une assistance, c'est
"Nico" qui s'occupe de lui. Encore un mordu qui a fait le Spartathlon,
nous sommes en bonne compagnie. Il m'offre aussi ses services, j'en
profiterai à l'occasion mais souhaite essentiellement coller à mon mode
"autonomie", j'ai tout dans ma sacoche 7L étanche, et ça devrait suffir.
J'ai fait un 1000
comme ça, avec aucune organisation, sur un PBP où il y a des ravitos
grand luxe tous les 80km, je devrais m'en sortir, tout de même.
À Mortagne, ambiance merguez, fiesta & cie. Je mange, ou plutôt,
nous mangeons, et c'est reparti. Reparti pour une nuit de folie, la nuit
où, évidemment, personne ne dort, le départ 16h00 est un petit peu le
rendez-vous des doux rêveurs et des gros furieux qui souhaitent boucler
l'aller-retour le plus vite possible.
Joker
Et alors là, au moment d'écrire ce CR, soit plus de 5 mois après les
événements, je m'aperçois que je ne me rappelle pas grand chose de cette
période. Pourquoi? Peut-être parce qu'il ne s'est pas passé grand
chose. Ah si, j'ai roulé, c'est certain. Mais bon le parcours était bien
balisé, j'étais bien entraîné, alors... ça a roulé!
Sur la route de Bretagne, la fleur aux dents.
En plus, la compagnie de Manu a été fort agréable, moi qui suis un
indécrottable bavard j'ai pu m'épancher à loisir, bref, rien à dire
(façon de parler).
Parmi les quelques passages remarquables, j'ai vraiment beaucoup aimé la
monté sur Roc Trevezel, et puis la descente bien sûr. Là pour le coup,
j'ai trouvé ça joli, et puis me dire que j'étais à plus de 500 bornes de
la maison... On a eu du pot avec le vent aussi, et sur l'ensemble du
parcours, on l'a plutôt eu dans le dos. Cela contraste avec mes autres
expériences récentes, en particulier ma ballade en amoureux avec Valérie
.
Je ne sais plus pourquoi, mais moi et Manu ne sommes pas rentrés dans
Brest ensemble. Je crois qu'il m'a lâché, à un moment je n'arrivais plus
à suivre. J'ai beaucoup aimé cette arrivée sur Brest. Le pont, tout ça.
Très chouette.
L'air de rien, pour arriver là, on n'a pas trop chômé, genre 25 heures,
je crois. Pas trop mal pour un 600. D'un point de vue strictement
cycliste, j'ai trouvé les participants de PBP plutôt réglos, pas de
soucis pour la prise de relais. Il faut dire qu'avec Manu on était
suffisamment nombreux (!) pour tenir assez longtemps, donc bon, j'ai pas
cherché la petite bête non plus.
Voir Brest et faire demi-tour
Arrivé à Brest donc, je cherche une poste pour poster la carte postale
que je veux envoyer à Valérie et mes filles. Je ne trouve pas de boîte
jaune. Finalement je confie ma missive à une charmante dame qui passait
par là et justement, allait vers la poste. Ça, c'est fait.
Le ravitaillement de Brest est, bizarrement, plus cher que les autres et
plutôt moins bon. Pas grave, on survivra. J'ai retrouvé Manu, nous
repartons ensemble. Nous sommes dans un petit groupe avec un
insupportable bavard (je suis chiant comme ça moi?) qui nous pompe l'air
à vouloir tout organiser comme un JO du club med'.
Plouf
Le temps s'annonce moyen. Ça souffle Ouest. Faut dire, on est en
Bretagne. L'avantage c'est qu'on file comme l'éclair sans pédaler fort.
Et puis ce qui devait arriver arrive. Ça pleut. Ça pleut sur Roc
Trevezen, et dans la descente je vois un type devant moi qui commence à
zigzaguer dangereusement. Que se passe-t-il? Sa potence (ou son jeu de
direction, j'avoue qu'en pleine descente j'ai pas vérifié davantage...) a
lâché et il n'a plus le contrôle de son vélo. Par chance, il ne tombera
pas. J'ai bien fait d'être prudent et de ne pas le suivre de trop près.
Arrivés à Carhaix, avec Manu, on hésite à dormir. Enfin, *il* hésite.
Moi je ne veux vraiment pas dormir ici, il doit être dans les 22h00 ou
23h00, si l'on dort, on se réveillera à 1h ou 2h du matin avec une très
longue portion de nuit avant que le jour se lève. Et ça c'est pas bon.
Je propose qu'on se fasse un petit peu mal pour tenir, par exemple,
jusqu'à St Nicolas du Pelem, où il y a de quoi dormir. J'arrive à le
convaincre. On part. Après environ, allez, on va dire, maximum 5 minutes
de route, on s'aperçoit tous les deux qu'on est morts de fatigue. Je
dors sur mon vélo. Mince. Les supers idées à tonton Christian. Mais
maintenant qu'on a commencé, on continue.
Équipement
de nuit. Noter la petite loupiotte sur le bras qui permet d'éclairer la
sacoche (road-book) et le compteur de vitesse.
Et puis devinez ce qu'on voit au loin. Des éclairs. Pas au chocolat, des
vrais éclairs d'orage bien méchant. Oups. J'essaye de demander à ceux
qu'on croise désormais par paquets (et qui sont sur le chemin de
l'aller) si ça pleut plus loin, ou pas...
Assez rapidement je comprends que ma question était débile. Il pleut des
hallebardes, le ciel nous tombe sur la tête. Je suis fatigué, je garde
jalousement ma veste thermique dans ma sacoche étanche pour ne pas
qu'elle se trempe mais en contrepartie j'ai juste un petit maillot
manche courte sous mon coupe-vent étanche. J'ai froid - et pourtant la
pluie n'est pas froide - j'ai envie de dormir, mais avant de dormir, il
va falloir se sortir de se traquenard. Avec Manu on voit bien des petits
abris par-ci par-là mais ils sont tous déjà squattés par des cyclos en
perdition.
Finalement, je n'arrive même plus à suivre Manu, la sueur de
l'après-midi me coule abondamment dans les yeux, entraînée par la pluie
de l'orage qui ruisselle. J'ai les yeux qui piquent horriblement, je
regarde par intermittence avec l'oeil gauche et l'oeil droit, parfois je
ferme les deux en même temps, de toutes façons vu ce que j'y vois avec
mes lunettes trempées... Je médite sur les pionniers du PBP, ceux qui
ont fait ça avec des vieilles lampes à incandescence pourries, sur des
routes de la même qualité, avec des textiles, hum, franchement pas au
niveau de notre confort moderne. Et là je dis, respect.
Je médite aussi sur la route à prendre. À un carrefour, je ne sais même
pas dire combien de routes partent du carrefour, c'est le black-out. 4
ou 5? Je dirais bien 5, ça part un peu en biais, là, là gauche, on
dirait. Finalement j'attends que des cyclos venus en sens inverse me
donne la route à prendre.
Et puis dans une descente, j'entends, "hé, Christian!".
Au coin du feu
Je regarde à gauche, il y a de la lumière. Je quitte la route, j'y vais.
Manu est là avec quelques autres cyclos. Il est minuit passé,
l'habitant nous offre son garage, il y a du café, on est au sec, wahou,
ça c'est le genre d'instant qui vous réconcilie avec la nature humaine.
Avec Manu, on se paye un peu de bon temps puis raisonnablement, on sait
qu'il va falloir y retourner. On juge que la pluie a baissé. On part.
Très vite on constate que la pluie n'a pas spécialement diminué. Très
vite Manu me lâche à nouveau, et je me retrouve seul à nouveau. C'est
comme ça, c'est la vie, Manu a raison de partir devant, je me traîne
tellement, il prendrait froid à m'attendre. Mon objectif : St Nicolas du
Pelem. Et là je dormirai un peu.
Gymnase complet
Arrivé à St Nicolas, je trouve Nico et Manu, et m’enquiers d'un endroit
pour dormir. Mais l'hôtel affiche complet. Plaît-il? Oui, il faut faire
la queue pour dormir. Pas bon. Là je commets une erreur, c'est de ne pas
m'en tenir à mon plan de base, à savoir dormir n'importe où, pourvu que
ce soit au sec. J'aurais pu me mettre dans un coin de cafétéria,
n'importe où, pourvu que la pluie ne me trempe pas davantage.
Mais j'y ai pas pensé.
En contrepartie, voyant mon désarroi, Nico me propose de dormir avec
Manu. Alors, là, comment vous dire. Manu dort dans le fond de son
"camion". Un petit utilitaire, en fait. Dans le fond de son camion y'a
déjà tout son bordel. Et il en a, du bordel. Plein. Donc il a poussé son
bordel pour se recroqueviller dans un coin. Moi, je dois me glisser
entre Manu et le bordel. C'est super sympa de la part de Manu d'accepter
de me laisser dormir ici. Je garde volontairement mon maillot manches
courtes mouillé sur moi, dans l'espoir qu'il sèche un peu avec ma
chaleur, pendant les deux heures de sommeil que je vais m'offrir. Je
suis tout de même bien trempé, je grelotte. Je dors assez mal, je dois
l'admettre. Mais c'est tout de même hyper réparateur. 1000 mercis Manu,
il y a des moments où l'on voit les vrais personnes sur lesquelles on
peut compter, et là, ça ne trompe, c'est un gars en or. Merci aussi à
Nico, qui a tout géré.
Au petit matin, on repart.
J'ai un peu froid, mais ça passe vite, et puis le jour va venir bientôt, allez, on y croit!
File continue
Le gros inconvénient de la portion qui nous attend, c'est que dans
l'autre sens, en direction de Brest, il y a plein, mais alors, plein,
plein, plein de cyclos. Et des vrais cyclos. Pas des comiques comme moi
avec un cadre en plastoc et une lampe à piles. Non, des vrais cyclos
avec un éclairage digne de ce nom, dynamo par-ci, grosse frontale par
là, c'est simple, c'est un véritable défilé de sapins de noël, et la
conséquence directe c'est que : j'y vois rien.
C'est un peu moins pire que pendant l'orage mais plusieurs fois, tout de
même, je mets pied à terre car à droite je n'arrive plus à savoir où
est le bord de la route, et à gauche j'ai peur de percuter un cyclo. Ce
fût une bonne galère.
J'ai vraiment été très content d'arriver à Loudéac, enfin, les choses
paraissent plus simples à gérer, nouvelle journée, climat potable, la
fin des embrouilles.
Sur cette portion de parcours, entre Carhaix et Loudéac, en comptant le
temps de sommeil, je crois que ma moyenne est entre 7km/h et 8km/h. Pas
glop. Mais c'est comme ça, et c'est déjà pas si mal.
Dernière journée
À ce stade, avec Manu, on commence à se douter qu'on va rentrer dans les
60h. Pour les 50h je sais que c'est mort depuis Brest (il est illusoire
de rentrer aussi vite qu'on est parti) et pour les 55h je sais que
c'est mort depuis Loudéac (pas crédible de rattraper le temps perdu dans
l'orage). En revanche, 60h, j'y crois encore.
Je ne sais pas, je ne sais plus où exactement a été prise cette photo. Peu importe. C'est bien mon vélo.
Donc, j'essaye de ne pas perdre trop de temps. Avec le lever du jour,
j'ai un regain de forme. Manu, lui, est en panne. J'essaye de le tirer,
il accroche moyennement. On discute, il me dit de partir devant. Bon,
tant pis, je pars. Je donne tout ce que j'ai ou presque, je me dis que
je suis dans la dernière ligne droite (il reste tout de même quelques
centaines de km...) et j'appuie sur les pédales. Il y a moins de monde
maintenant, en sens contraire on ne croise plus personne, et dans notre
sens, retour Paris, c'est clairsemé. De temps en temps il y a un paquet
de 4 ou 5 mais c'est tout.
Contrôle surprise. Ah tiens. Chouette un café!
Et puis au contrôle d'après, alors que je me régale d'un énorme petit
déjeuner (j'ai mangé comme un ogre sur ce PBP 2011) qui vois-je
débarquer? Manu. À peine 5 ou 10 minutes derrière moi. C'est clair, nous
finirons ensemble. Je le laisse manger tranquille, et on trace à
nouveau la route à deux.
Villaines la Juhel, cette ville m'avait marqué lors du 600 Montigny,
accueil très chaleureux. Là, en août, c'est plus officiel, moins "à la
bonne franquette". Ça reste tout de même franchement sympa. Et nous
repartons, nous avons tendance, avec Manu, à perdre un temps fou aux
ravitos (enfin, selon mes standards) en revanche entre les deux, on
trace.
La pluie a menacé cet après-midi, mais nous sommes restés secs.
Ce n'est pas sérieux
Au départ de Mortagne, la nuit va bientôt tomber. Nous partons seuls, un
groupe qui avait commencé à se joindre à nous et voulait qu'on parte
ensemble est finalement parti devant, de toutes façons ils commençaient
presque à m'agacer.
On dépasse un pot de yaourt (vélo caréné) jaune canari qui fait un
boucan d'enfer. Puis on rattrape un collègue. La nuit tombe. Je prends
le relai. Je souhaite vraiment rentrer en 60h. Alors j'appuie un peu. On
roule à un peu plus de 30. Manu et notre compagnon de route trouvent
que j'en fais un peu trop. Bon. Soit-disant je ne serais pas
raisonnable, il reste de la route, tout ça tout ça. OK, je lève le pied.
Et puis, on rattrape un 4ème larron. Et puis je ne sais plus ce qui
s'est passé, comment c'est arrivé, mais on se retrouve à rouler comme
des malades. Et là, c'était pas ma faute. Un peu celle de Manu je pense.
Il allume comme un vrai gamin, le même qui 30 minutes avant me disait
d'y aller doucement nous tire à 38km/h.
On rattrape des paquets entiers de cyclos, en général ils roulent
facilement 5 à 10km/h moins vite que nous. J'ai un super souvenir de
cette route vers Dreux, de nuit, la bande blanche se détache nettement
du bitume noir, et elle sert de guide à celui qui prend le relai. Relais
que je prends très peu, voir pas du tout, moi j'avais signé pour un
trajet soutenu mais raisonnable vers Dreux, genre on ne s'endort pas
mais on ne se tue pas non plus. Là c'est du grand n'importe quoi, on
dirait que ça s'amuse à secouer le cocotier, nous avons plus de 1000
bornes dans les pattes, et pourtant... J'avoue que par moment j'ai
vraiment failli laisser partir cette bande de malades devant pour
rentrer tranquillement à la maison.
Mais comme d'habitude, je me suis accroché.
Au radar
Dreux. Mon objectif, repartir rapidement, avec le train d'enfer qu'on a
mené nous n'avons pas du tout sommeil. L'avantage de rouler à fond: ça
réveille.
J'adore
cet éclairage orange des lampes au sodium, plein de souvenirs
remontent, toutes ces arrivées nocturnes dans des villages un peu
perdus, que ce soit sur des brevets cyclos ou sur des trails genre Raid
28.
Mais on s'éternise. Quand enfin nous repartons, je suis à moitié
endormi. Et là je dois remercier une seconde fois Manu, il a été une
vraie mère poule pour moi, il a trouvé la route, m'a attendu, guidé,
alors que moi j'étais en train de m'endormir sur le vélo.
Comme dans un rêve, je vois du sable sur le bord de la route, je
m'imagine sur une route qui va plein Sud, j'essaye de me pas m'enliser
dans les zones où le sable est trop profond. J'en tiens une bonne.
Je me réveille un peu lorsque nous nous rapprochons de la banlieue
parisienne. Et là, en haut d'une bosse, je perds Manu, nous étions dans
un petit groupe, j'ai un peu attendu, il est parti un peu devant, j'ai
décroché légèrement, je me suis trompé d'embranchement à un rond-point,
et là il m'a pris 300 mètres.
Et là j'essaye de revenir. Impossible. Je donne tout ce que j'ai.
J'essaye de l'appeler. Mais j'y arrive pas, de toutes façons il
n'entendra pas. Je vois son feu arrière, au loin, dans certaines lignes
droites. J'appuie, je mouline, je fais tout ce que je peux pour revenir.
Franchement, j'ai pas chômé. Et j'ai fini par le rejoindre. Il
m'avouera être surpris, lui-même pensait bien rouler et avait décidé
d'en mettre un coup, lassé du côté un peu mou du groupe que nous avions
rejoint.
Bon, là, nous sommes à moins de 10km de l'arrivée, c'est certain, nous
arriverons ensemble. On jardine presque à l'entrée de St Quentin, et
puis voilà, c'est fini, rond-point, Gymnase des Droits de l'Homme, ayé,
PBP 2011 fini! Environ 59h, le chiffre exact on s'en fout.
Bilan
Si c'était à refaire? Je ne changerais pas grand chose. Peut-être bouger
un peu plus mes grosses fesses aux points de contrôle (j'y ai perdu
beaucoup de temps) mais bon, pour une première participation, ça ira.
Niveau aventure et péripéties, super. L'autonomie, l'orage, tout cela
était fait pour me plaire, et même si on reste très bien bichonnés par
l'organisateur, à un moment il faut quand même se débrouiller seul, et
ça, c'est très bien. Heureusement, PBP, ce n'est pas *que* du vélo. Même
s'il y en a beaucoup.