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 Récit de mon premier PBP (2015)

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Cyssousport
Mollet d'acier
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Cyssousport


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Récit de mon premier PBP (2015) Empty
MessageSujet: Récit de mon premier PBP (2015)   Récit de mon premier PBP (2015) Mini_h10Mer 16 Sep - 16:13

Compte rendu du PARIS-BREST-PARIS randonneurs
16 – 20 août 2015


Samedi 15 août 2015, je suis resté seul dans notre logement de vacances à Saint-Quentin-en-Yvelines pour me reposer. Vers 15h00, je pars pour rouler un peu, faire tourner les jambes. Je rejoins aux abords du vélodrome (lieu de départ et d’arrivée de ce PBP version 2015) Thomas D. avec qui j’ai fait pas mal de Brevets de Randonneurs Mondiaux depuis l’an dernier, le Raid Provence Extrême cette année ainsi qu’un aller-retour à Briançon en mode entrainement (2 x 300 km). Nous partons ensemble reconnaitre les premiers et les derniers km de ce parcours en totalisant 1230. Nous partirons ensemble dans la deuxième vague de départ le lendemain à 16h15.
Après une petite heure tranquille à pédaler sans forcer, nous retournons au vélodrome pour le contrôle technique des vélos et le retrait des plaques de cadres. L’organisation est parfaite, l’accueil des 6000 participants est très bien orchestré. 19h00, retour à l’appartement, repas copieux en sucres lents, derniers préparatifs et vite au lit, la prochaine nuit complète est prévue pour mardi soir si tout va bien… et nous ne sommes que samedi soir…

Après une bonne nuit de sommeil, et un copieux petit déjeuner, je vais rapidement apporter un sac de ravitaillement à Thomas et à son assistance « Ben » qui sera présent sur les points de contrôle pour nous ravitailler. Mon assistance (Magali et les enfants) a prévu d’être présente au contrôle de Tinténiac à l’aller et au retour (km 363 et 865) ou d’après ma feuille de route prévisionnelle, je devrais passer lundi matin et mardi matin, à chaque fois vers 6h00...
15h00, après un bon repas (encore des sucres lents) et une petite sieste, je me prépare pour me rendre à vélo sur la zone de départ.Arrivée sur place, des vélos partout et des milliers de cyclos autour du nouveau vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines. Vers 15h30, je me rends dans mon sas de départ, discussion avec d’autres cyclos, je mange encore des pates que j’avais emmenées dans une boite en plastique, Thomas arrive, et très vite, la première vague de départ se dirige vers l’arche pour le coup d’envoi de cette folle aventure. Dans l’attente de mon tour, mon « Fan » club arrive, Magali et les enfants, des amis ainsi que mon frère et mon neveu, tout ce monde déplacé de loin pour m’encourager dans les premiers tours de roue me fait chaud au cœur (Banderole, casquettes et autres goodies à mon attention, merci à tous).

16h00, nous entendons les acclamations du très nombreux public au départ de la première vague, dans 15 minutes, c’est à nous… 16h10, nous sommes derrière la ligne de départ, Thomas près de moi, l’excitation est à son maximum mais aussi une part d’inquiétude et de questions liées à la distance (ma plus grande sortie est de 604 km) et à ma préparation perturbée par cette maudite fracture du col du fémur en décembre dernier. Je suis qualifié et c’est déjà un bel exploit quand je repense à ma lutte pour traverser le séjour en déambulateur fin décembre…

16h15, nous sommes lâchés, sous le soleil et une température idéale de 24°c. Très vite, sur le premier pont, je regarde les « casquettes oranges » visibles de très loin.
Cette fois, c’est parti ! 2 ans de préparation à concrétiser en 80 heures maximum.

Dans les jours précédant le départ, j’ai reconnu les 20 premiers kilomètres du parcours ce qui me permet d’être un peu plus serein vis-à-vis des pièges urbains. Le départ est très rapide, le rythme va bientôt baisser me dis-je…. Au km 100, le rythme est toujours très rapide, et je vois dans une petite bosse quelques mètres devant un maillot que je connais bien, il s’agit de Richard L. – parti 15 minutes avant moi - que j’ai rencontré l’an dernier sur le BRM 300 d’Aix en Provence. Il est en train de faire son 11ème PBP… respect. J’ai roulé avec lui sur plusieurs BRM, et il a su me faire partager sa grande expérience. Cela me fais plaisir de rouler à nouveau un peu avec lui, j’échange quelques mots puis il me souhaite bonne route et rajoute « N’oublie pas ce que je t’ai dis, si l’abandon te traverse l’esprit, arrête-toi, dors, mange, fais le point sur les délais et ensuite tu verras que tu auras largement le temps de finir cette belle randonnée ». Je poursuis ma route, simplement heureux.

Au ravitaillement de Mortagne, je ne vois pas Ben, il faut dire qu’il y a un monde incroyable par cette douce soirée d’été. Je m’arrête 2 minutes pour mettre mes équipements de nuits et attendre Thomas que j’ai perdu de vue depuis quelques kilomètres mais qui ne doit pas être loin derrière.Nous repartons tous les deux en chassant pendant 4-5 km un groupe devant, la jonction se fait assez facilement sans trop taper dans nos réserves. Thomas me dit juste qu’il ressent des débuts de crampes mais qu’il gère. Il m’avouera plusieurs jours après l’arrivée qu’à ce moment, ses crampes l’inquiétaient beaucoup pour le reste du parcours et même que l’idée de l’abandon lui a traversé l’esprit.

Après 140 km, le compteur affiche la moyenne ahurissante de 37,5 km/h…. comme sur une cyclosportive… qui dure 140 km… il en reste plus de 1000… Ça va vite, mais jusque là, je suis resté dans les roues, et je n’ai pas l’impression d’avoir laissé beaucoup de jus. En fait, notre groupe est parti très fort pour rejoindre le premier, c’est chose faite, et à partir de là, la vitesse moyenne, devient moins « folle » sans pour autant être sur un rythme « longue distance ».

La nuit tombe, nous restons dans ce groupe  jusqu’à Villaines(contrôle N°1 – km 220), ou Ben nous permet une rapide assistance pour remplir les bidons avant le contrôle. A ce premier contrôle (coup de tampon sur la carte de route), l’ambiance dans ce village est magique, beaucoup de public pour nous encourager et nous poser des questions pendant la courte pause pour mettre le coupe-vent de haute visibilité. Je ressens dans ces questions l’admiration et l’envie que j’ai eu voici maintenant 3 ans quand j’ai commencé à me dire que je voulais le faire…
Avec Thomas, nous repartons rapidement et très vite arrivons à reformer un groupe de 20 cyclos, tant mieux, la nuit ne sera pas solitaire.

Le rythme jusqu’à Fougères (contrôle N°2 – km 309), que nous atteignons vers 1h40, est moins rapide même si la vitesse moyenne reste élevée pour une telle distance programmée. Ben est au contrôle, aux petits soins pour nous, un tampon, un peu de salée, un peu de sucré, un coca et nous repartons. L’arrêt aura durée 7 minutes au total, c’est express, mais si l’on veut garder le contact avec le bon groupe, il ne faut pas trainer.

Nous repartons donc au cœur de cette nuit fraiche pour une étape de 54 km seulement jusqu’à Tinténiac ou Magali et mon fan club doivent m’attendre. En route, nous traversons un passage à niveau dont le signal sonore retentit au moment de l’aborder… tout le groupe passe avant que les barrières ne commencent à se baisser. Dans mon plan de route, j’avais prévu d’être à Tinténiac (contrôle N°3 – km 363) tôt le matin… Nous y arrivons vers 3h40. Je sais que mon assistance est positionnée 3 km après le contrôle. Je réalise donc un pointage express avant de repartir en avance sur le groupe afin de profiter au maximum de mes supporters. Je fais 3 km en mode « contre-la-montre », les jambes vont bienset la tête aussi, tout se passe au mieux, pour l’instant.

En arrivant au point de ravitaillement prévu, l’ambiance est chaleureuse et je trouve tout le monde en pleine forme, je m’assois, mange un peu. Toutes ces têtes connues, qui viennent de loin pour me voir quelques minutes au beau milieu de la nuit froide (7 minutes à 7°c) me motivent à bloc pour terminer cette belle aventure. Je mange un peu, me fais appliquer de la pommade anti-inflammatoire sur les genoux de façon préventive, change la batterie de mon phare et rigole avec mon fan club au top de leur forme même à 3h45 du mat’. Merci à tous.
Le groupe d’une douzaine de cyclo arrive, je me remets vite en route pour ne pas avoir à chasser trop longtemps. L’étape jusqu’à Loudéac passe très vite, les premières lueurs du jour, instant magique, puis les premiers rayons de soleil viennent réchauffer la lande Bretonne. Cette première nuit sur le vélo est bien passée, aucun moment de sommeil intense à gérer.

Pointage à Loudéac (contrôle N°4 – km 448) vers 7h00. Avec Thomas, nous pointons rapidement pour rejoindre au plus vite Ben quelques centaines de mètres plus loin et ses petites attentions culinaires préparées sur la table de camping, qui passent encore bien. 10 minutes plus tard, le groupe passe, nous nous hâtons de repartir. Ben dois rester à Loudéac pour notre second passage dans le sens retour (prévu en fin d’après-midi), ce qui lui laisse le temps de se reposer.
Le groupe roule toujours bien, le niveau est homogène. Il y a 3 autrichiens, 2 allemands, 2 italiens, 1 belge, 1 espagnol et 8-10 français.

En général, à chaque contrôle, il faut marcher un peu pour aller faire tamponner notre carton de route, je profite de ces moments pour lire les SMS d’encouragements que je reçois. Parfois même, quand la route monte et que la vitesse du groupe est faible, je me permets de lire également les SMS reçus, et c’est comme cela que j’en reçois un de Ben qui annonce qu’il sera au contrôle de Carhaix avec viennoiserie et crêpes au Nutella – Vive la Bretagne.
Dans la série d’acrobatie que je dois faire sur le vélo, j’ai réussi à remplacer mon écran de lunettes de nuit par le solaire, attraper une canette de soda dans ma sacoche arrière pour la boire sans m’arrêter. Garder les bonnes roues, cela se mérite…
A St-Nicolas-du-Pélem, (km 493) on nous annonce un contrôle secret, arrêt obligatoire pour pointer notre carton de route et nous repartons très vite. Petite glissade de la roue arrière sur un morceau de moquette mouillé qui a été mis pour faciliter la sortie du contrôle…. Frayeur sans conséquences.

Carhaix (contrôle N°5 – km 526) vers 10h00, comme une routine, nous pointons rapidement afin de rejoindre au plus vite Ben. Comme prévu, pains au chocolat et crêpes copieusement garnies me font un bien fou. Le groupe passe déjà, Thomas est pressé de repartir, moi je ne me suis pas encore délesté d’une grosse envie pressante et en plus, je n’ai pas fini ma crêpe…. Donc arrêt express, 3 minutes montre en main.
Je pars « à la bourre » avec encore une crêpe dans la main…. Thomas avais raison, le groupe est passé il y a bien 2 minutes, la chasse va être longue. Nous sommes 4, et me sens un peu responsable de cette sortie du groupe avec mes crêpes. Je me mets donc à la planche pour rattraper le groupe que l’on ne voit toujours pas même dans les grands bouts de droits… Je suis un peu soutenu par Thomas, les 2 autres cyclos s’accrochent derrière.Je continue la poursuite, mais me pose la question de poursuivre l’effort…. Finalement, au bout de 15 minutes le groupe est en vue, mais nous avons bien failli nous retrouver en groupe minimaliste… la gourmandise…. Mais il faut bien ingérer les 30000 kcal que l’on dépense sur l’ensemble du parcours….

Après avoir donc rejoint le bon groupe, nous attaquons la montée du Roc’hTrevezel, point culminant de ce parcours. Lors de cette ascension, des cyclos du coin se joignent à nous, nous félicitent pour notre courage, et cela nous donnent des informations sur la suite du profil et le sens du vent à l’approche de Brest.

Ensuite, je trouve la longue descente jusqu’à Sizun assez pénible, il faut dire que depuis le départ, nous avons eu 80% de route avec un bitume « granuleux » qui nous transmet beaucoup de vibrations dès que la vitesse augmente.
Vers 13h00, nous traversons le pont Albert Louppe qui acte notre entrée dans Brest, s’ensuit un moment d’euphorie, mêlant joie de la mi-parcours, odeur de l’océan et vue sur la rade de Brest.

Cette première partie de périple est passée plutôt rapidement, sans problème physique, et c’est content que j’arrive au contrôle de Brest (contrôle N°6 – km 614), ou nous faisons une grande pause de 9 minutes… le temps d’aller à pied acheter un sandwich à l’autre bout de la cité universitaire qui accueille le 18ème PBP. En repartant, la joie se poursuit à la vue des nouveaux fléchages du parcours avec les pancartes « Paris ».
La sortie de Brest est un peu pénible avec de la circulation et surtout la réflexion sur le retour qui fait tout de même 600 km…. Après l’euphorie, le doute apparait, vite dissipé par le rythme du groupe plus raisonnable et par le croisement du ruban de cyclos en route pour Brest.Très vite, je croise Richard L. et ai juste le temps de l’encourager. La montée du Roc’hTrevezel dans l’autre sens en début d’après-midi se fait plutôt facilement pour moi malgré les difficultés pour m’alimenter correctement qui commencent à m’inquiéter.

Au cours de cette ascension, je croise Isabelle E. (et donc Frédéric E. ne doit pas être loin, mais je ne l’ai point vu). Isabelle et Frédéric sont sur leur 3ème PBP (en 56 heures pour le second, excusez du peu…15ème temps féminin tout PBP confondu et 1ère féminine pour l’édition 2011). Je les ai rencontré en 2014 sur mon tout premier BRM (200), et ensuite, j’ai roulé avec eu a de nombreuses reprises avec toujours autant de plaisir.
Dans les grandes rampes bien droites qui mènent à Carhaix, 2 Italiens s’arrêtent pour satisfaire un besoin naturel, je fais de même en me disant qu’à 3 nous reviendrons facilement. Je repars, et me rends compte très vite que les Italiens ne sont pas là, je ne les vois même pas…. Je me lance à la poursuite du groupe qui est une minute devant… C’est long pour réduire cet écart… Je me rapproche, et vois que Thomas mène le groupe… J’aurais dû le prévenir de mon arrêt. Finalement, malgré mes jambes qui commencent à être dures et à la faveur d’une hésitation du groupe dans un carrefour, je reviens. Très vite je me rends compte que j’ai laissé des forces dans cette poursuite et que mes problèmes d’alimentation commencent à sérieusement m’handicaper dès que la route se cabre.

Cela fait 24 heures que nous sommes partis et nous avons parcouru 695 km. Je fais l’élastique, perds le groupe dans les montées, et recolle à la faveur des descentes.
Je m’accroche jusqu’au contrôle de Carhaix (contrôle N°7 – km 698), ou je pointe vers 16h25 (lundi 17 août). Je décide de ne pas m’attarder, ni au contrôle, ni au camping-car assistance de Thomas, mais vais tout de même rapidement acheter un sandwich et une banane, la bénévole ne s’en sors pas avec la caisse enregistreuse… je laisse la monnaie pour mettre le casse-croute sur ma sacoche et filer au plus vite, comme on peut filer vite après 700 km... J’ai averti Thomas que je ne m’arrêterai pas au camping-car (que je ne verrais même pas).

Je n’ai presque pas prit d’avance sur le groupe, et très vite je suis rejoint, et à nouveau, je fais l’élastique, il faut vraiment que j’arrive à m’alimenter si je veux avoir une chance de rester dans ce groupe. Je retente de manger un peu, ça ne passe pas, même l’eau me provoque des reflux gastriques très pénibles, et plusieurs fois je ne suis pas loin de tout ressortir…

En entrant dans Maël-Carhaix, je suis 50 mètres derrière le groupe, et je reste bloqué une minutederrière une moissonneuse batteuse qui peine à croiser un tracteur… mais le groupe est passé juste devant… Ça y est, dans ma tête, je craque, et sais que le bon groupe est parti, je finirai les 500 derniers km « à mon rythme ». A la sortie de ce joli village Breton, un signaleur annonce un contrôle secret (avec pointage obligatoire). Je pose le vélo dans le parc à vélo, le groupe vient de finir les pointages et récupère les montures pour repartir. Thomas, qui n’avait pas vu que j’avais lâché, me dit de vite aller pointer, qu’il m’attend pour recoller le groupe au plus tôt. Mais dans ma tête, la fatigue aidant, j’ai déjà basculé en mode « seul » pour la suite. Je lui dis que je ne peux plus rien manger, que les jambes ne suivent plus, (et la tête non plus). Je lui souhaite bonne route et vais pointer. Moment très difficile de voir Thomas, mon compagnon des grands parcours, partir, mais il est trop fort. Au départ, déjà, je pensais ne pas pouvoir finir avec lui (plus costaud dans la gestion du sommeil et bon rouleur  en sus…). 700 km fait avec lui, ce n’est pas si mal…

En sortant du pointage, un bénévole vois que je ne suis pas bien, me propose une soupe (qui ne me fait absolument pas envie) et une chaise pour m’assoir quelques minutes. Je prends mon sandwich, m’assois et discute ¼ d’heure avec le bénévole. J’arrive à finir ma collation solide lentement, par petites bouchées.

17h07, je repars, seul. Je me donne 1 heure pour rouler tranquille à 22-24 km/h avant d’aviser de la suite (grosse pause ou poursuivre directement). Je me mets à rouler vraiment tranquille, et je profite même du paysage… Au détour d’un virage, je reconnais, venant d’en face, Yvan L. l’administrateur du forum des « Rubans Blancs », forum de discussion dédié à la longue distance sur lequel j’ai passé beaucoup de temps en décembre / janvier dernier en convalescence de ma fracture. Je ne l’ai jamais vu, juste par quelques photos et avatars sur internet, c’est dire que pour le reconnaitre, je ne devais pas rouler bien vite, juste eu le temps de crier « Yvan… les rubans blancs »…
Après encore quelques kilomètres je commence à me sentir mieux, je peux à nouveau manger et boire un peu, les jambes profitent de cet apport d’énergie, la vitesse augmente en même temps que le moral. Je m’arrête quelques minutes auprès d’un riverain offrant du café et des gâteaux aux cyclos. Nous sommes un petit groupe autour de la table, on parle Italien, Allemand, Anglais, Suédois et Français. Je suis le seul à aller vers Paris, tous les autres vont vers Brest, et je me dis que finalement, je ne suis pas si mal. Merci pour le café et petits gâteaux qui sont « passés ».

Je croise toujours de façon quasi-permanente des cyclos qui sont encore à plus de 150 km du demi-tour Brestois, certains ont des plaques de cadre en « B », ce qui signifie qu’ils sont partis en même temps que moi. Furtivement je reconnais une des sœurs « Juju » également membre des rubans blancs, qui sur le PBP 2011 avait été suivi pour la réalisation du reportage de France 3 « Sur la route de l’extrême » que j’ai visualisé de nombreuses fois.
A Saint-Nicolas-du-Pelem, nous devons repasser dans l’enceinte du contrôle secret du trajet aller, sans pour autant avoir besoin de s’arrêter.La moquette à la sortie du complexe est « taggé » afin de marquer le danger qui m’a généré une belle frayeur à l’aller…

A 20h20, je pointe à Loudéac (contrôle N°8 – km 780). Le parc à vélo est quasi-complet, et comme au supermarché, il faut repérer la lettre de la rangée on l’on laisse sa machine. Et dire qu’à l’arrêt du trajet aller, il y avait 10 vélos au maximum…bon il faut dire que quasi tous vont vers Brest…Je contacte Ben, juste pour savoir s’il est encore là, ou si mon retard l’a contraint à filer au-devant de Thomas pour le contrôle suivant. Réponse immédiate par SMS : « Bien sur Cyrille - ;-) ». Je sors prestement du contrôle, et les signaleurs m’orientent avec le flot de vélos vers Brest… pas fou ???, « j’en viens, moi, je rentre à Paris » !!!.
A la sortie de la ville, je retrouve Ben pour un arrêt ravito d’1/4 d’heure. Je ressens depuis quelques temps une douleur de type tendinite au tendon d’Achille et genou droit – moi qui appréhendais pour la jambe gauche après ma chute de décembre… Je me pose rapidement 2 gazes imbibées d’anti-inflammatoire avant de repartir pour encore quelques kilomètres avant que la nuit ne tombe et de mettre l’éclairage en route. Merci Ben.

Je croise encore de nombreux cyclos (la plupart ont dû partir lundi matin – sinon le « hors délais » doit les guetter), et trouve pénible les phares dans les yeux que je n’ai pas fermés depuis plus de 35 heures.
Peu avant 23h00, à St-Méen-le-Grand, je fais une rapide pause café offert par des enfants qui tiennent une petite table depuis très tôt ce matin, ils ont l’air aussi fatigués que moi, mais restent enthousiastes à proposer un petit ravito à tous les cyclos fatigués. Merci les enfants.
A 00h15, je pointe rapidement à Tinténiac (contrôle N°9 – km 865) avant de repartir en me disant que si tout va bien je viens de rentrer dans ma dernière journée sur ce PBP. A la sortie de Tinténiac, mon assistance + fan club est encore là (j’avais choisi de faire du « tourisme » à Brest, eux avaient choisi St-Malo), toujours dans une ambiance de folie avec banderoles, casquettes et gilets fluo.

 Je passe de la selle au transat, mange un peu en discutant. Magali a installé une tente près de la voiture, j’hésite, mais par précaution, sachant que la fin de nuit sera longue, m’installe pour m’endormir en 2 secondes pour 30 minutes. Le réveil sonne, et je me rendors 2 fois pour quelques minutes supplémentaires. Il faut une volonté forte pour se lever dans le froid et surtout l’humidité de cette nuit. Je prends vite un bol de céréales qui passe très bien, je profite d’être déchaussé pour inspecter ma semelle interne qui me fait un peu mal et manque de verser mes céréales dans ma chaussure… !!!J’enfile ensuite ma veste d’hiver puis repars seul pour 2 heures fabuleuses. Lecteur Mp3 dans les oreilles, les jambes répondent bien, je me régale à fendre la nuit à la lumière du phare. Rouler la nuit est vraiment quelque chose de fabuleux.

Après un rapide arrêt pour renseigner un Anglais parti le dimanche soir, complètement perdu en direction de Brest, j’arrive au pointage de Fougères (contrôle N°10 – km 919). Je pointe en 4 minutes chrono, puis file avec 3 autres gars, vers la sortie de ville pour rejoindre mon assistance. J’arrive à la voiture, tout le monde dort (il est 04h25mardi et Mag n’a dormi que 3 heures depuis dimanche matin …), j’hésite, mais je n’ai besoin de rien d’indispensable, je laisse mon assistance dormir et je repars rapidement afin de rejoindre les 3 autres cyclos pour enfin ne plus rouler seul.

 Je trouve le rythme pas très rapide et suis donc souvent en tête de ce petit groupe ou tout le monde parle Italien, ce n’est pas maintenant que je vais faire la conversation pour me tenir éveillé.

Vers 5h30, en tête de groupe, je me fais réveiller par le cri de l’Italien qui me suit alors que je roule dans le bas-côté herbeux. Le jour va se lever bientôt, j’hésite à m’arrêter pour dormir, mais après réflexion, l’arrêt est impératif, cette alerte aurait pu mal finir si la configuration du terrain avait été différente. C’est quelques minutes après, dans le village de Gorron, que j’ouvre un SAS de banque ou 2 cyclos avec j’étais à Brest squattent déjà le paillasson.

Après 30 minutes d’arrêt dont 20 de sommeil, je repars avec mes nouveaux compagnons qui eux ont dormi 1 heure. Nous jouons ensemble au jeu des pronostics sur l’heure d’arrivée (il reste environ 280 km) et tombons d’accord pour dire que le « - de 50 heures » est encore faisable, mais il ne va pas falloir mollir. Il me reste plus de 40 heures pour être homologué, et même si mes douleurs tendineuses augmentent, je sais que je validerai mon premier PBP.

Je roule avec mes compagnons un peu plus de 2 heures, passe la barrière symbolique des 1000 km, Au pointage de Villaines (contrôle N°11 – km 1008), comme à mon habitude maintenant, je pointe rapidement (vers 08h50) avant de rejoindre mon assistance à la sortie du village. En arrivant à la voiture, Magali à tout préparé pour mon confort, un transat, un café chaud, des victuailles, une brosse à dents…

A chaque fois, j’ai l’impression de ne pas m’arrêter longtemps, mais le confort de ces arrêts fait que l’on ne voit pas le temps passer. C’est donc 20 minutes plus tard que je reprends la route, seul, pour une étape de 80 km jusqu’au prochain contrôle.

Les 2 heures suivantes se passent plutôt bien, puis le rythme diminue à nouveau, et dans de grandes lignes droites avant Mamers, je me fais rejoindre par un étranger (un Autrichien, il me semble). Je roule dans sa roue quelques kilomètres, mais dois le laisser partir dès que la route s’élève. Je m’arrête une dizaine de minutes pour enlever ma veste hiver, mes jambières / manchettes et manger encore un peu. Je repars pour une fin d’étape difficile, traverse des villages ou le public m’encourage avec des : « Bravo, plus que 200 km… ». S’en est trop… passage à vide, le dimanche matin, quand je pars pour 200 km, c’est énorme, alors là… . Je refuse de m’arrêter, mais je roule à 18 km/h sur le plat, je repense à mon grand-père qui m’a inspiré étant gamin pour la randonnée longue distance, je craque, mais la roue avant tourne toujours, j’avance, pas vite, mais j’avance.

Après quelques kilomètres vraiment très difficiles, je reçois un SMS de Magali qui me dit être au pointage à Mortagne, cela me rebooste et c’est enmangeant sur le vélo que je fais les derniers kilomètres de cette difficile étape.

A 13h05, je pointe à Mortagne (contrôle N°12 – km 1088), et apprend que le premier est arrivé à St-Quentin-en-Yvelines en 42h26 (52 min devant un groupe qui a chassé depuis Brest – 8 min de retard alors). J’apprends aussi que je suis le 65ème à pointer à ce contrôle. Je retrouve la petite famille sur le parking pour un arrêt que je ne souhaite pas trop long, mais toujours fort en attention et émotion.

Un quart d’heure plus tard, je repars motivé d’être dans le top 100 et décidé à y rester. Les jambes vont bien, la tête aussi. Encore plus de 140 km pour en terminer, mais je suis mieux, et cette distance ne me fait pas peur.

Les premiers kilomètres de cette étape sont vallonnés, puis lorsque la route devient plus plate, c’est le vent de face qui contrarie ma vitesse de progression. Rapide calcul, c’est foutu pour être sous la barre des 50 heures… dommage, mais pas grave.

 Je traverse Senonche, un cyclo dort sur un banc public. A la sortie du village, un autre cyclo, hors PBP celui-là, me rejoins et me demande s’il peut m’accompagner jusqu’à Dreux. Heureux de cette compagnie, la discussion raccourcie la distance et affaibli le vent. Merci à lui.

Vers 16h25, je pointe à Dreux (contrôle N°13 – km 1166). La disposition de ce contrôle nous oblige à beaucoup marcher – en plus sur du bitume – entre le parc à vélo et la table de pointage. J’ai mal au-dessous des pieds, et cette marche avec les cales m’énerve un peu, énervement vite dissipé par la bonne ambiance et l’accueil des bénévoles.

Je repars pour la dernière étape assez courte (64 km) avec la ferme intention de ne pas mollir… Sortie de Dreux, un saut de chaîne (le premier avec ce vélo et les 12000 km au compteur depuis novembre 2014).Ne pas mollir, mais le vent est toujours de face, et je suis à nouveau seul. La vitesse n’est donc pas très élevée et rarement au-dessus de 25 km/h. La route est plate et monotone. A 25 km de l’arrivée, je me fais doubler par un Anglais et un cyclo Suédois et j’arrive à ma caler dans leurs roues, ils roulent plutôt bien et je décide de tout faire pour rester avec eux. Le cyclo Suédois est en plaque de cadre « A », il est donc parti 15 minutes avant moi. Par contre l’anglais est en plaque « B » donc parti en même temps que moi et mon petit challenge pour les km restants est de finir devant lui. Les relais sont appuyés, encore une belle côte (courte mais raide – surtout après plus de 1200 km…) et très vite je retrouve les routes que j’avais repérées la semaine précédente. Cela me rassure, et la route parait plus facile, plus roulante. 18h44, j’ai de bonnes jambes, reste 11 km, je préviens par SMS mon « Fan club » déjà sur la ligne. Nous rentrons dans l’agglomération de St-Quentin, reste 5 km. Nous sommes toujours 3. Sur le boulevard de ceinture, nous ne prenons pas la voie cyclable encombrée de poteaux, feuilles mortes et nid de poules…. Un chauffeur de bus me le fais remarquer en me « tassant » contre le trottoir…. Je relance l’allure, énervé, mais à fond.

Nous rentrons sur la base de loisirs, plus que 3 km sur une route sans voitures, je roule maintenant à 40-45 km/h, en tête du petit groupe, je donne tout, savoure ces instants que j’ai imaginés des centaines de fois depuis 2 ans et demi. Le bonheur immense est plus fort que la douleur, j’ai réussi, je le sais, j’en suis sûr.

Juste avant d’arriver, je double 2 cyclos au ralenti (dont l’Autrichien de la fin de matinée).

Les 100 derniers mètres sont sur un chemin en graviers, je ralenti fortement pour ne pas risquer la chute si près du but. Je passe la ligne, la puce « bipe », j’ai fini, il et 19h11.

Je pose le vélo dans le parc à vélo quasi vide, puis discute un bon moment avec le public venu voir les « héros ordinaires ou les conquérants de l’inutile ». Cette discussion me ramène 3 ans en arrière, lorsque je me posais des tas de questions sur la faisabilité d’un tel défi… « On ne s’entraine pas pour PBP, on s’y prépare ».

 Les chiffres (de mon compteur)
·         Distance : 1233 km
·         Temps de trajet : 50h55'09’’
·         Temps de roulage : 45h05’
·         Vitesse moyenne globale : 24,22 km/h
·         Vitesse moyenne roulante : 27,35 km/h
·         Vitesse maximum : 72,4 km/h
·         Dénivelé positif : 11968 m
·         Fréquence cardiaque moyenne : 114
 ·        Cadence de pédalage moyenne : 69
·         Température mini : 4,0°c
·         Température maxi : 30,0°c


Les points positifs
·         Je n’ai jamais pensé à l’abandon,
·         Un trajet aller « facile » et rapide,
·         Les 10 derniers kilomètres « magique » et à fond.
 
Les points négatifs
·         Obligation pour moi de m’arrêter 2 courtes fois la seconde nuit pour dormir,
·         Difficultés d’alimentation au bout de 24 heures d’effort,
·         Pas réussi à rester dans le « bon groupe de Brest » vers le km 700.


Remerciements

A Magali et aux enfants pour leur patience sans faille pendant les 2 ans d’entrainements.

A Magali et aux enfants pour leur soutien pendant et après cette formidable aventure sportive qui est devenu aventure familiale.

Aux familles B. et P. d’avoir fait autant de kilomètres pour voir passer un cycliste au milieu de 2 nuitsBretonnes froides.

A mes parents, frères et sœur et belle-famille qui m’ont suivi dans ma préparation et tout au long de ces 1230 km mythiques et qui n’ont jamais douté de ma réussite malgré les mois difficiles du début d’année.

A Benoit et Emmanuelle pour le prêt de leur appartement si pratique et si proche de la zone de départ / arrivée de l’épreuve permettant de me concentrer sur l’objectif.

A mes amis, voisins et collègues, cyclistes ou non pour leurs soutiens et attentions ainsi que pour leurs accompagnements dans ma préparation physique.

A Thomas avec qui j’ai partagé autant de kilomètres en préparation et lors de ce PBP, un formidable rouleur au mental d’acier.

A Benjamin « Ben » pour son assistance aux divers points de contrôles, ses encouragements dans les moments de doute et ses crêpes au Nutella à Carhaix.

A la société SAMT (et à Frédo) pour son aide financière et matérielle (tenue approuvée pour 1230 km)…

Aux journalistes du « Régional » et de « Lançon Info » pour leurs articles sur ma préparation et sur cette belle randonnée.

A Magali et à « No Limit Project Events » pour l’organisation de la soirée pour fêter ce PBP.

Enfin, à mon grand-père qui m’a inspiré le gout de la longue distance et à mon père qui m’a permis de concrétiser ma première randonnée à l’âge de 11 ans.
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Récit de mon premier PBP (2015)
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