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 Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007)

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Jéjon
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MessageSujet: Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007)   Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007) Mini_h10Lun 3 Sep - 15:08

Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007)




I. Qui frappe ?

Dès les premières centaines de mètres, il m’aura été difficile de les distinguer : ces claquements secs à mes oreilles, est-ce la pluie sur le casque, est-ce un groupe de badauds applaudissant sur le trottoir ? Seul critère dans la nuit : si la sonnette tinte spontanément, c’est la première ; si elle résonne sous l’action de mon doigt, c’est le second.


II. J.-P.


« Non, Jean-Pierre, non !… Je suis inscrit sans assistance : tu ne peux pas m’aider ! » C’est peine perdue : J.-P. trotte déjà devant Normandie et moi, nous guide vers le contrôle, pousse la porte pour nous faire entrer. « Je vais déjà au restaurant ; vous buvez quoi ? Et n’oubliez pas : il me faut une petite photo pour GreenBull, hein ! » Au self-service, j’aurai le malheur d’acheter une banane… « M’enfin, j’en ai plein dans la camionnette, ’fallait pas ! »

Non loin stationne en effet le Quartier général de J.-P., où il nous emmènera de force. Des matelas en tapissent le fond, jonchés de victuailles. « Vous voulez dormir ? Parce que là, j’attends Malric et Jean-Mi, vous avez un peu de temps, si vous voulez… » J.-P. gère ses paillasses avec la prévenance d’une mère maquerelle. Mais Normandie dispose également d’une camionnette, et je souhaite repartir au plus tôt. Je m’en tirerai avec une tranche de cake et un bol de gnôle — « vingt-cinq ans d’âge ! »

J.-P. ! J.-P., l’abri de montagne perdu sur un parking, l’amphitryon des randonneurs, le Charon des contrôles qui refuse l’obole !


III. Le Croisement


En quittant Brest, la randonnée soudain se replie sur elle-même : la majeure partie du trajet est commune à l’aller et au retour. On remonte la file de ceux qui arrivent. Le soleil enfin jette une clarté sur le visage des forçats. Mon prénom résonne deux ou trois fois, et je reconnais des compagnons de brevets. Les vélos couchés saluent leur semblable.

Désormais, le peloton s’est scindé en deux castes : ceux qui ne sont pas encore à Brest et ceux qui n’y sont déjà plus ; ceux qui sont encore un peu à Paris et ceux qui y sont presque déjà. Une sorte de pitié s’insinue aussi… Si j’ai quitté Brest depuis deux heures, les randonneurs que je croise ont plus de quatre heures de retard sur moi. Un absurde sentiment de culpabilité en vient même à s’immiscer : plus j’avance, plus ils prennent du retard ! Chaque minute passée à pédaler en met deux entre mes vis-à-vis et moi… Et c’est même une sorte d’angoisse qui finit par m’étreindre pendant que je me livre à ces calculs : « Voilà quarante heures que je suis parti, et j’ai quitté Brest il y a trois heures. Ce type que je croise maintenant arrivera donc à la moitié de son parcours en quarante-trois heures, et il lui en restera quarante-sept pour le retour. Mais une demi-heure plus tard, le même cycliste qui me fera signe (ou n’en aura plus la force) disposera d’une heure de moins pour rentrer à Paris… » L’horloge décidément est implacable. Une heure plus loin, vingt-cinq kilomètres plus tard, la route est en effet déserte — elle ne se peuple plus que des fantômes de tous ceux qui ont abandonné, hors délai. Tous ceux pour qui, à l’instant « t » de notre croisement, la somme « mon temps total + mon temps depuis Brest » serait supérieure à quarante-cinq heures.


IV. 27 kilomètres gratuits


Une heure après le départ, la voiture qui limitait la vitesse au son geignard d’une cornemuse crachotante se range sur le côté : les randonneurs sont désormais livrés à eux-mêmes, ils quittent la clarté confortable des banlieues pour entrer dans la nuit. On n’a évidemment pas pris la peine, pendant cet aimable préambule, d’examiner le fléchage — la forme, la disposition, la fréquence des balises… Par paresse, on suit alors ceux qui précèdent en se fiant à leur vigilance… jusqu’à ce qu’un motard de l’organisation avertisse notre petit groupe de vélos couchés et tandems qu’il s’est fourvoyé. « Et c’est par où ? » « J’en sais rien, je suis comme vous, j’connais pas la route ! » Après quelques minutes d’interrogations et une liaison radio, nous prenons à gauche. Et c’est près d’une demi-heure plus tard que nous débouchons, en épingle à cheveu, sur une route constellée de phares blancs et dansants : les vélos droits des nonante heures, partis une heure après nous, viennent à notre rencontre ! Verdict du compteur : vingt-sept kilomètres de détour, une heure perdue.


V. En Miettes


Pâte feuilletée ? Pâte brisée ? Qu’importe : mon Paris-Brest est en miettes, en écailles qui tombent des yeux sans les dessiller. Le fléchage est trop fiable, rendait inutile la lecture des cartes et feuilles de route. Il suffisait de s’abandonner au ruban de bitume, de laisser venir et s’échapper les toponymes. Tout se mélange dans ma mémoire — était-ce de jour, de nuit ? à l’aller, au retour ? en descente ou en montée, sous la pluie ou le crachin ?


To be continued...
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MessageSujet: Re: Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007)   Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007) Mini_h10Mar 4 Sep - 18:33

Jéjon a écrit:
Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007)


[center]V. En Miettes


Pâte feuilletée ? Pâte brisée ? Qu’importe : mon Paris-Brest est en miettes, en écailles qui tombent des yeux sans les dessiller. Le fléchage est trop fiable, rendait inutile la lecture des cartes et feuilles de route. Il suffisait de s’abandonner au ruban de bitume, de laisser venir et s’échapper les toponymes. Tout se mélange dans ma mémoire — était-ce de jour, de nuit ? à l’aller, au retour ? en descente ou en montée, sous la pluie ou le crachin ?


Très joli récit , soit certain qu'au bout de 2 ou 3 PBP sous le soleil , la mémoire grave des lieux , des heures , des temps , des moments .....
qui sont toujours autant de merveilleux souvenirs d'autant qu'ils ne sont plus flous !
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Jéjon
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MessageSujet: Miettes bis   Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007) Mini_h10Mer 5 Sep - 8:22

Merci... Voici la suite.



VI. Normandie


Le premier contact avait de quoi le refroidir. Avisant la peinture douteuse de la bôme du Baron prêté par Malric, je demandai si celui-ci lui avait refilé une de ses épaves en guise de vélo. « Ça va pas, non ? C’est les dessins de mes enfants que j’ai collés dessus ! » Il fallut toute la lumière du jour et ma raison retrouvée le lendemain pour apprécier en effet le réalisme des gribouillages : on reconnaissait bien le papa sur sa monture.

Normandie et moi avons joué à cache-cache pendant plus de six cents kilomètres. J’arrivais aux contrôles comme il en repartait. Sur le chemin du retour, à Carhaix, je raccroche néanmoins à son train d’enfer — rendu d’autant plus éblouissant que l’homme, avec désinvolture, filme paysage et concurrents d’une main aérienne. Notre compagnonnage fut à mes yeux le plus étroit de cette randonnée : peu de mots, beaucoup de joie. À ses côtés, les monts d’Arrée ont défilé sous nos roues tels des toboggans de pacotille. Il s’envole dans les descentes, je le rattrape (à moins qu’il m’attende) dans les côtes.

Lorsque nous aurons réalisé que nous sommes en tête de la « course » que se livrent les quelques vélocouchistes francophones suivis par balise GPS, les taquineries s’aiguiseront : oui, sans doute cela se règlera-t-il au sprint… Je loue maintenant la sagesse qui m’a fait prendre un peu d’avance sur ce sprint, dès Loudéac, à 450 kilomètres de l’arrivée.


VII. Des cartes dans les rayons


Flac-Plic-Clap-Chlaf-Clac-Flip-Tchap-Clac !
Sur le côté herbeux, huit à dix gosses ont tendu leurs paumes, scrupuleusement alignées pour qu’elles résonnent d’une seule rafale.


VIII. Les Brel


Les traîtres ! Ils me dépassent dans un faux-plat descendant, alors que je tiens une barre de céréales dans la main gauche ! Je prends un air aussi décontracté que possible et, toujours grignotant, les reprends dans le faux-plat montant qui suit. Il n’en fallait pas plus pour gagner leur estime, et nous discuterons longtemps de nos machines. Ils sont belges, mais nous ne nous sommes jamais rencontrés lors des brevets qualificatifs. Christophe est un jeune homme fougueux et puissant mais au rythme fluctuant ; son père Romain est impressionnant de régularité et grimpe toutes les côtes assis sur sa selle — ce qui me fait penser, bien que la raison en soit médicale, qu’il ferait des miracles sur un vélo couché. Ils sont partis mardi matin, avec les 84 heures (donc huit heures après moi), mais leur objectif initial de 55 heures ne semble plus réaliste : le soleil est haut dans le ciel de ce troisième jour. Notre vitesse me stupéfie : plus de 40 sur le plat (avec un vent modéré de trois-quart dos), 25 dans de bonnes pentes. Je ne pense pas tenir longtemps. Dans certaines côtes pourtant, Christophe se place derrière moi en confiant : « Je profite un peu de ta roue, hein ! » ou en sifflant son père pour qu’il ralentisse, avant de placer des attaques dignes d’une épreuve cyclosportive… À la faveur d’une de ces accélérations, je jette l’éponge et les laisse s’éloigner.

J’entre aussitôt dans une bourgade et aperçois quelques cyclistes s’éloigner dans une mauvaise direction. Suspectant qu’ils connaissent le parcours de la dernière édition, je ne prends pas la peine de les rattraper. Deux kilomètres plus loin en effet, la route sur laquelle je débouche est parcourue de randonneurs qui ne se sont pas même rendus compte de leur erreur. Romain est parmi eux, en colère. « Tu as vu Christophe ? Ben, il m’a largué ! Moi, j’en ai ras-le-bol : il roule comme un malade, il brûle les feux rouges, chais pas c’qui lui prend ! Ça fait trois jours qu’on roule sans dormir, et j’ai soixante balais, moi, j’ai autre chose à faire ! Qu’est-ce qu’il a à prouver ? »
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Jéjon
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MessageSujet: Re: Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007)   Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007) Mini_h10Lun 24 Sep - 12:35

IX. Dormir


Ma seule souffrance, déjà éprouvée lors des brevets qualificatifs. La première torpeur s’abat très tôt, dès la première étape, après quelques heures de route : inquiétant. Jean-Lou, que je rejoins après ma petite escapade de Gambais en lui demandant dans quel état il se trouve, me confie également : « Ben, je galère un peu, en fait… » Nous n’avons pas fait deux cents kilomètres, et il en reste plus de mille. Or, je souhaite rallier Brest d’une traite !

C’est à Carhaix que je devrai finalement faire halte : après 525 kilomètres, le vélo exprime de plus en plus une irrépressible envie de tâter du fossé. Dans l’antichambre, six bénévoles reçoivent les spectres du bitume. Le premier est un interprète français-anglais, le deuxième enregistre le numéro de dossard, le troisième attribue un lit vacant, le quatrième note l’heure de réveil souhaitée, les deux derniers nous conduisent dans la salle obscure. Des cartons couvrent le sol de cette gigantesque pièce ; quelques centaines de lits de camp y sont disposés et numérotés. Au fond, je m’enfonce dans un brumeux marécage, sur les bourbeuses berges d’un Léthé armoricain : l’incroyable diversité des ronflements, dans tous les tons, sur toutes les cadences, mime un assourdissant concert de batraciens. C’est à peine si j’ai le temps de regretter l’oubli de mes bouchons de cire… Quatre heures plus tard, on me secoue l’épaule : il est temps de se remettre en route. J’ai gardé sur moi mes vêtements humides, et il me faut seulement enfiler les éponges détrempées qui me servent de chaussures.

Brest. J’ai traversé la rade comme le jour se levait. Malgré la fraîcheur du matin, ce soleil inattendu écrase et surexpose les infrastructures du point de contrôle. J’ai besoin de dormir un peu. Au fond du réfectoire gisent déjà quelques types, sur des praticables de gymnastique. Un quart d’heure suffira. Je me réveille en sursaut après une heure et quart.

Carhaix, de nouveau. Dans la file du self-service, un malaise, un haut-le-cœur me prend. Je sors précipitamment et m’étends dans l’herbe, au soleil : puisque je ne puis manger, je dormirai. Las ! Moins de dix minutes plus tard, un nuage de pluie obscurcit le ciel, dont l’abri d’un grand thuya ne me protègera pas longtemps. Puisque je ne puis dormir… retour au restaurant ! J’y dévore une énorme assiette de poisson avec double ration de légumes.

Fougères, sans doute. Je viens encore de manger un repas copieux et me sens particulièrement vaseux (l’expression me semble bizarre, un brin oxymorique… « particulièrement vaseux » ? l’esprit « clairement obscurci », « nettement confus » ?). J’ai besoin de dormir encore. Je me rends au dortoir. « Quand souhaitez-vous être réveillé ? » Je finis de calculer… « À trois heures. » Trois paires d’yeux m’examinent. « Vous allez dormir moins d’une heure ? » « Oui. » Une voix, derrière moi : « Ah oui, il y en a, des comme ça…! » L’organisation est un peu moins fluide ici, les places sont rares. On me fait entrer dans la « chambre 1 » ; une odeur pestilentielle me suffoque. Mon guide hésite, se penche sur les corps étendus. « Attendez-moi un instant. » Je reste de longues minutes debout, figé, enveloppé et soutenu par les fils que croisent autour de moi des ronflements continus. Mes yeux commencent à distinguer un tableau noir, une mappemonde épinglée au mur. L’homme revient : « Il y a de la place dans la chambre 7. » L’odeur y est un peu différente mais tout aussi fétide ; sans doute dans un état second, j’en viens pourtant à la humer avec un dégoût mêlé de curiosité, en faisant abstraction de sa source : c’est un musc vigoureux, presque capiteux, dont on pourrait traquer infiniment les puissantes épices. Les matelas sont jointifs. « Voilà, c’est là : 105. Bon, ils ne vous laissent pas beaucoup de place… » « Ça ira. Dites, je peux changer l’heure ? Vous pouvez me réveiller à trois heures et demie ? » Je me cale de justesse entre deux types à la bouche ouverte. Celui de gauche doit être le plus bruyant de la chambrée… Sous la couverture rêche étroitement serrée, je m’endors aussitôt dans mon cuissard et mon T-shirt mouillés.

Était-ce la Mayenne ? Était-ce le Maine ? Dans la nuit noire, le souvenir me reste d’une région forestière et peu peuplée. À nouveau, les paupières se baissaient inexorablement — d’abord dans les descentes, que l’obscurité rendait trop dangereuses pour vouloir encore pédaler, mais aussi dans les côtes, où le mouvement automatique des jambes ne suffisait plus à maintenir la conscience éveillée. À la dentelle floue des arbres succédèrent soudain, de part et d’autre de la route, les arêtes franches et d’encre de quelques bâtiments isolés. Je m’arrêtai et me mis à la recherche d’un abri (cabane, poulailler, réserve de bois ?) où je pourrais étendre mes couvertures de survie. C’était une ferme ; nul chien n’aboya. Depuis que le Paris-Brest me hante, j’ai espéré pouvoir dormir dans la paille d’une grange de hasard — Jean-Lou, sceptique, n’y voyait qu’un mythe romantique ! Certes, je ne pus trouver de foin. Mais sous un hangar abritant un enclos désert, une large auge en bois, propre et sèche, semblait m’attendre. Derrière le tracteur, sur quelques stères de bois, se trouvait même une vieille couette roulée en boule et piquée de quelques brins de paille ! Je la disposai dans la mangeoire et m’y ensevelis : tel un cercueil, l’auge était taillée à la carrure de mes épaules. Bien que le hangar fût ouvert à tous les vents, je m’y endormis aussitôt d’un sommeil sépulcral, dont l’apocalyptique trompe de mon réveil ne put réussir à me tirer après un quart d’heure. Une heure plus tard, un cri d’outre-tombe m’éveillait en sursaut. Nul doute que, si un fermier fulminant et agitant la fourche m’était alors apparu, je l’eusse pris pour quelque démon infernal… Le ciel pâlissant annonçait, il est vrai, le troisième jour de ce Paris-Brest, le dernier jugement de mes ambitions. Dans le corps de logis, une lampe s’était allumée. À mille lieues des apparitions méphistophéliques, le café m’y eût assurément été offert si l’on m’avait surpris — mais je repris aussitôt la route, parmi les cris épars des randonneurs qui de temps en temps se hélaient.
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MessageSujet: Re: Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007)   Miettes d'un Paris-Brest-Paris (2007) Mini_h10Mar 6 Nov - 14:30

X. Feux


Le peloton est encore très serré. Dans le rétroviseur, c’est un ballet de feux-follets. Devant, une gigantesque ville en feu. Brest s’est-elle déjà embrasée dans le matin de mon abord ?


XI. El Vasco


Un secteur pentu. C’est là surtout que je double les randonneurs, par longs chapelets. Dans mon rétroviseur apparaît cependant, au plus fort de la côte, un coureur qui ne rapetisse pas. Le miroir inséré dans mon casque est indécelable, et j’aime surprendre ceux qui vont me dépasser en leur adressant, avant qu’ils ne soient à ma hauteur, un petit signe d’admiration. C’est un « Hola ! » qui me répond. L’homme me jette un œil souriant et passe avec un « Vamos, vamos… » que j’interprète seulement comme un encouragement. Mais, ayant pris sa roue, je le vois se retourner régulièrement et comprends avec émotion qu’il veut faire de moi un compagnon de route. Nous discuterons beaucoup jusqu’au contrôle suivant — en espagnol, langue que je n’ai jamais étudiée.

Il est basque ; c’est son premier Paris-Brest-Paris. Nous détaillons nos machines : la sienne, un superbe carbone aux pignons si régulièrement étagés que leur empilement paraît cylindrique ; la mienne, dont la livrée bigarrée trahit aux yeux de tous l’origine artisanale, mais qui suscite l’admiration de mon compagnon par son aptitude à grimper. « Va a matarme ! », me dit-il parfois dans les côtes, alors que sa conversation m’a stimulé. Ses rodillas, ses genoux le font un peu souffrir. Au contrôle, sous le casque de cet homme que je croyais avoir mon âge, je découvrirai un crâne largement dégarni, cerclé d’une couronne de mèches grises et frisottantes.
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