Compte-rendu P137

Bonjour à tous
J'ai enfin récupéré après mon PBP et un Covid attrapé en rentrant à la maison qui m'a fait bien mal.
Voici mon récit


En 2015, faisant du vélo depuis seulement deux ans, j’étais venu voir les cyclistes du Paris-Brest-Paris à leur passage à Brest. J’étais en admiration devant tous ces courageux et je voulais, un jour, faire partie de ces  forçats de la route. Huit ans plus tard, j’y suis.
Mon « camp de base » est tout trouvé depuis longtemps puisque j’ai un frère qui habite à Crécy-Couvé, sur le parcours retour du PBP, à 1h environ de Rambouillet. Le lieu est paisible, à l’écart de l’effervescence de la ville, idéal pour aborder ce défi dans les meilleures conditions. Les derniers mois ont été intenses et j’arrive en ce mois d’août dans une bonne forme. Les BRM, notamment 400 et 600, ont été durs et l’expérience accumulée ces deux dernières années m’a fait comprendre qu’il vaut mieux éviter les départs rapides et qu’après une nuit de roulage j’ai besoin de dormir 1h30 – 2h avant d’enchaîner avec la journée. Je me présente donc à Rambouillet avec un plan bien défini : Je ne me laisse pas entraîner par les premiers groupes, je m’arrête dormir à Villaines-la-Juhel vers 4h, je dors chez mon frère après Carhaix le lundi soir et j’arrive à Brest le mardi matin. Pour le retour, c’est moins précis mais je prévois de dormir à Quédillac ou Tinténiac.
Le jour J.
Avec mon frère, nous quittons son domicile à 17h pour un départ à de la vague P à 19h45. Pour nous rendre à Rambouillet, nous devons emprunter en sens inverse une partie du parcours du PBP. Nous croisons le premier groupe vers le 40èkm. Il est encore bien compact mais, derrière, les suivants semblent plus dispersés, il y a déjà beaucoup de cyclos seuls sur la route. Nous nous garons sur le grand parking extérieur à l’entrée de Rambouillet et rentrons dans le parc à pied. Passage devant le château où je fais une pause pour manger un dernier petit sandwich. J’arrive dans mon groupe une vingtaine de minutes avant le début de la procédure de départ, c’est-à-dire le déplacement vers le contrôle des vélos. Ensuite, il n’y a qu’à suivre, c’est très bien organisé. A 19h45, comme prévu, la vague P s’élance. Nous sommes 292 et je suis dans la première moitié. Dès la sortie du parc de Rambouillet, nous sommes dans la campagne, avec la vitesse réglée par une voiture ouvreuse. Il faut être vigilant car il y a parfois des ralentissements et, vu le peu d’espace entre les vélos, ça peut s’empiler vite. A la sortie de St-Léger-en-Yvelines, l’allure augmente soudainement. Je comprends rapidement que la voiture ouvreuse n’est plus là et que les fauves sont lâchés, le groupe éclate en plusieurs morceaux. Comme je ne suis pas loin du groupe de tête, je fais l’effort avec quelques autres et nous finissons par rentrer à l’entrée de Condé-sur-Vesgre. Mais à la sortie de la ville ça repart fort et avec un léger vent de face, cette fois-ci je préfère me relever. Je mets quelques kilomètres à faire baisser le rythme cardiaque avant de prendre mon allure de croisière. Il y a alors du monde partout sur la route, c’est impressionnant. Je suis surpris de constater que, dès le début, beaucoup de cyclos adoptent une allure plutôt modeste et ne cherchent pas à former des groupes. Je n’ai pas le sentiment de forcer outre mesure mais j’en double beaucoup. Je reviens notamment sur JC Chabirand que je reconnais par son numéro de plaque, parti un quart d’heure avant moi, je le salue et continue mon chemin. A Châteauneuf-en-Thymerais, je sais que mon frère et sa famille m’attendent quelque part. Comme il fait déjà nuit c’est plus difficile mais je finis par les voir à la sortie de la ville. Mes nièces ont confectionné des pancartes d’encouragement, je me dois de m’y arrêter. La pause est brève, le temps d’une photo et de récupérer de l’eau et c’est reparti. L’excitation du début passée, j’ai l’impression que le PBP commence maintenant. Je rentre dans une routine où je continue à bien rouler et à doubler beaucoup de monde. Je roule seul et ne cherche pas de compagnie, trop compliqué à ce stade. Nous arrivons dans le Perche et les premières grosses difficultés arrivent. Je suis surpris par la sortie de Longny-au-Perche que je finis tout à gauche. Certains la terminent même à pied. J’arrive à Mortagne-au-Perche à 0h20. Je m’arrête au point d’accueil après une montée de la ville qui me paraît interminable. Je décide de prendre le temps de bien me restaurer. Au final, je passe près de 40 minutes à Mortagne, plus que ce que j’avais prévu. Comme d’habitude après avoir mangé, la nuit, j’ai froid en repartant sur le vélo. Et comme je suis dans une longue descente en quittant Mortagne, je ne pédale pas et je grelotte et le vélo tremble avec moi. A tel point que j’ai peur de partir dans le décor. Heureusement la descente s’arrête, je peux de nouveau appuyer sur les pédales et tout rentre dans l’ordre. Je continue à bien rouler jusqu’à Villaines-la-Juhel que j’atteins à 4h du matin. Là encore, je prends mon temps pour me restaurer. Je vais au self où je prends un repas complet. Puis, au lieu d’aller au dortoir comme je l’avais prévu, je reste sur ma chaise en pensant dormir facilement. Evidemment ça ne marche pas et je finis par repartir de Villaines peu avant le lever du jour en ayant juste fermé les yeux pendant 30-40 minutes. Le résultat ne se fait pas attendre, la journée de lundi est difficile. Je commence à sentir la chaleur en fin de matinée, je ne m’hydrate pas assez et l’envie de dormir se fait de plus en plus pressante. Je dois m’arrêter deux fois l’après-midi pour des siestes et une gêne au tendon d’Achille commence à poindre. Cela ne m’inquiète pas trop à ce moment-là mais les routes bien vallonnées du centre Bretagne ne vont pas arranger la chose. J’arrive à Carhaix, il est près de minuit lundi soir, j’ai 2h30 de retard sur mon planning. Je prends le temps de manger au self avant de faire les 30 derniers kilomètres pour rejoindre mon dodo chez mon deuxième frère. Je me réveille à 7h mardi après environ 3h30 de sommeil. Le tendon est toujours sensible et un peu gonflé. Tant pis, je dois continuer comme ça, je ne peux pas abandonner avant Brest. Je reprends la route à 8h à Huelgoat et m’insère dans le flot des cyclistes qui viennent de Carhaix. L’allure est assez lente, je vois beaucoup de cyclos fatigués. Malgré mes soucis tendineux, je roule un poil plus vite que la plupart de ceux qui m’accompagnent et j’en double plein. J’en vois même certains qui s’arrêtent soudainement au bord de la route et qui se mettent à dormir, la tête posée sur le cintre, en restant debout. Impressionnant et un peu dangereux quand même. En entrant dans Landerneau, j’arrive sur un secteur que je connais par cœur. Je sais alors, malgré la route encore bien vallonnée, que je vais réussir à rallier Brest mais je sais aussi qu’il va être difficile de repartir avec un tendon fatigué. L’émotion me gagne plusieurs fois sur le chemin mais j’arrive à Brest 1h avant la limite horaire avec le sourire pour recevoir l’accueil de la famille et des amis. Après avoir fait tamponner mon carnet, je vais de suite au service médical. Les soins me font du bien et je dis à mes supporters que je vais repartir. Après un bon repas, je quitte la cité du Ponant vers 13h. Entre Brest et Carhaix je vais être fixé sur ma capacité à continuer l’aventure car c’est le tronçon le plus vallonné du PBP et ça commence dès le départ du contrôle. La montée vers la place de Strasbourg est raide mais en montant tranquillement, ça passe. En passant le bord de mer au Moulin Blanc, je vois beaucoup de cyclistes s’arrêter pour admirer la vue et prendre des photos. Pour moi, c’est un paysage connu, je trace. Après le passage du pont Albert Louppe, les bosses s’enchainent. Elles ne sont pas forcément très dures mais le cumul de dénivelé fait son travail de sape, d’autant que la température commence à monter. En arrivant au Faou, la douleur est revenue et le tendon est plus gonflé qu’à Brest. Après un dernier arrêt pour refaire le plein d’eau, je pars à l’assaut de la côte de Ty Jopic en direction de Pont-de-Buis. Mais le cœur n’y est plus et au bout de 500m de montée, je préfère arrêter là. Avec ma vitesse limitée, si je continue, j’arriverai au mieux hors délai et au pire je devrai abandonner en pleine nature loin de tout. Ici, c’est plus facile de venir me chercher avec une voie express qui passe à côté. A 15h30, mardi, j’appelle mon frère, l’aventure est terminée.
J’éprouve une grosse frustration après cet échec car j’ai fait des erreurs que je ne devais pas faire : Je suis parti trop vite et j’ai beaucoup roulé grand plateau les 200 premiers kilomètres et en relançant en plus, je ne suis pas allé dormir à Villaines-la-Juhel comme prévu au départ, je n’ai pas bu assez d’eau, j’ai relevé la selle de 1,5cm une dizaine de jours avant le départ. Ne pouvant rester sur cet échec, je serai probablement au départ de l’édition 2027.

Avec cette première expérience, tu peux faire la liste de ce qui n'a pas fonctionné.
            Nous faisons tous un schéma de notre parcours les semaines précédant le départ et çà nous travaille pas mal. ( En tout cas, çà se passe comme çà pour moi). Mais même en se connaissant bien, il faut savoir s'adapter sur le terrain, c'est à ce moment qu'on prend les décisions appropriées (pauses, sommeil, alimentation, hydratation).
            Et surviennent les impondérables, les plus retors à résoudre. Ta tendinite a cassé ta progression et tu aurais sans doute moins douté si tu avais été en pleine possession de tes moyens.
            Tu vas avoir 4 ans pour plancher sur ton sujet. Et tu reviendras plus fort en 2027.

Bravo, tu as participé, c'est de toute façon le plus important. Je comprends cette frustration. Effectivement l'erreur à ne pas faire est de changer un réglage important sur le vélo. Ce PBP est absolument incroyable, être avec le monde entier, tous dans la même recherche… il y a de la magie. J'ai aimé m'arrêter sur les bords de route, discuter avec les bretons, tous super sympa; manger des crêpes, et le monsieur en haut de la dernière colline avant Brest, avec son camping car, qui offrait café gâteau… Incroyable, il est toujours là haut. Pour moi, réussi en 84h09, je m'étais fixé 85 h, en vélocouché. Mon objectif, ne plus jamais me mettre border line, c'est ma ligne de conduite.
Essaie de ne pas le prendre comme un échec, mais une belle expérience. Bravo pour ta belle tentative. Tu l'as tenté, tu l'as fait quand même, t'es un champion car t'as osé. Nicolas

Slt !
Beau compte-rendu.
Oui, tu t'est lancé, c'est le principal.

J'ai eu plus de chance : en arrivant à Mortagne au retour, mon tendon me faisait vraiment mal (et peur), mais une fois descendu de vélo, ça c'est calmé avant même le soin au contrôle.
Plus senti après. Bon, ne s'était manifesté qu'après Carhaix retour de mémoire...

Reste plus qu'a maintenir la forme jusqu'en 2027 !

Salut Carril
Merci d’avoir partagé ton expérience 
Tu écrit avoir relevé la selle de 1,5cm donc 15 millimètres,  j’ai bien compris ?
Cela me semble énorme,  pour quelle raison ? Tu avais des douleurs ? Etait ce pour augmenter l’efficacité de ton pedalage en devellopant un peu plus ?
Cela a probablement favorisé la tendinite plus que l’allure "grand plateau" au départ.

Merci pour vos encouragements, ça fait plaisir. L'échec est digéré et je pense déjà aux prochaines échéances.
Concernant mes soucis au tendon, il faut que je précise que c'est un tendon qui m'a déjà causé des soucis quand je jouais au football et que je faisais un peu de course à pied. Mais depuis dix ans que je me suis mis au vélo je n'avais jamais eu de douleur.
J'ai évoqué plusieurs pistes pour expliquer mon problème dont le relèvement de la selle. Pour répondre à la question d'Orangina56, c'est bien de 15 millimètres que je l'ai relevée. Je l'ai fait car le réglage précédent (hauteur 70cm pour entrejambe de 82cm) ne me convenait pas (douleurs aux fesses). Mais je ne pense pas que ce soit cela la cause car j'ai roulé quelques années par le passé avec une hauteur de 72,5cm sans que ça me provoque des tendinites. Avec le recul, je pense plutôt au manque d'hydratation aux heures les plus chaudes.

Il peut y avoir plusieurs causes, mais moi aussi, un tel changement de hauteur de selle m'interpelle aussi près du départ. D'une manière générale, il est très déconseillé de modifier ses réglages ou son matériel peu de temps avant le départ d'une épreuve longue. Je connais un gars de mon coin qui a remplacé sa selle Brooks par une SMP la veille du départ ! Il avait déjà malocu après un essai de 40 km aussitôt après. Sur PBP, il n'a pas dépassé Tinténiac aller...